Darou Salam ASMA a fait sensation en Italie au mois de mai en remportant le tournoi international Gaetano Scirea, du nom de ce célèbre footballeur italien des années 1980 mort tragiquement dans un accident de voiture en Pologne en 1989. Il s’est imposé notamment devant l’AC Milan, la Juventus de Turin et le Partizan de Belgrade. Ce sacre est le premier succès d’un projet ambitieux porté par un Sénégalais vivant en Italie qui veut réaliser le même modèle que Diambars, Génération Foot, Dakar Sacré-Cœur ou Aspire. Un projet qui fait rêver des centaines de jeunes.
L’année prochaine, Darou Salam ASMA verra son logo aux côtés de ceux de l’Atalanta Bergame, l’Inter Milan, de l’As Roma, de la Juventus de Turin, de Naples entre autres sur le « Trofe internazionale Gaetano Scirea », dédié à l’ancien défenseur de la Juventus, vainqueur de la Coupe du monde 1982 avec la Squadra Azzura et d’une Ligue des Champions et sept titres de champions d’Italie avec la Juve. Il s’agit d’un tournoi international qui regroupe, chaque année en Italie, des joueurs de moins de 16 ans, surtout des jeunes pensionnaires des clubs italiens les plus prestigieux. Au palmarès, par exemple, figure le Partizan de Belgrade, trois fois vainqueur du trophée, ce qui en fait le club le plus titré à égalité avec l’Inter de Milan, la Juventus et l’Atalanta. Et c’est justement le club serbe que l’équipe sénégalaise a battue en finale pour être sacrée championne. Darou Salam est d’ailleurs le premier centre africain à disputer ce tournoi international. Cette victoire finale (2-0) conclut ainsi un parcours exceptionnel. Seulement une seule défaite (contre Plzen 3-2) contre cinq victoires notamment devant le Milan AC (3-1), Bari (2-0) ou encore la Juventus de Turin battue (4-2) en demi-finale. En plus du trophée, l’équipe de Grand Yoff est rentrée avec le titre du Meilleur joueur du tournoi décerné à Pape Abib Guèye et celui du Meilleur buteur remporté par Adama Koné, auteur de sept réalisations en six matchs. Un autre, Fadel Cissé, avait été sacré Meilleur joueur lors du premier voyage. Deux expériences uniques pour ces jeunes qui rêvent grand. « Ce qu’on a vu là-bas nous donne des raisons de nous tuer au travail pour rester. Nous rêvons d’aller dans leurs clubs. Ils sont très en avance sur nous, ils ont tout et n’ont pas beaucoup de soucis. Ce tournoi nous a beaucoup appris », témoigne, rêveur, le capitaine Idrissa Gaye.
Un tournoi qui a révélé Raùl, Guti, Marchisio, Giovinco, Chevchenko
Mais avant l’Europe, c’est d’abord Darou Salam qui façonne le rêve de ces gamins en quête d’un avenir doré. Un rêve que vit pleinement Pape Idrissa Guèye, lui qui n’a connu que le football de rue et les « navétanes ». « Avant de venir dans le centre j’avais entendu dire que le président était un Modou-Modou qui amenait des joueurs en Italie. C’est lui-même qui m’a fait venir après m’avoir vu jouer dans les « navétanes ». Je ne pouvais pas refuser cette opportunité. Pour moi, c’est juste comme un rêve qui s’accomplissait », se réjouit le jeune attaquant de 16 ans. Ils sont aujourd’hui 65 jeunes à partager le même rêve. Tous aspirent à marcher sur les pas des grands noms du football sénégalais et mondial et surtout de ceux qui sont passés par la Coppa Gaetano Scirea, à l’image des anciens joueurs du Real Madrid Raùl et Guti, de Sebastian Giovinco et Claudio Marchisio de la Juventus, Alessio Cerci Milan AC, ancien de la Roma ou encore l’ancien capitaine et buteur de l’équipe nationale d’Ukraine, Andrey Chevchenko (Dynamo Kiev, AC Milan, Chelsea).
Ce tournoi, le deuxième auquel a participé Darou Salam, marque en effet un tournant dans la vie de ce centre de formation qui n’a commencé à participer à des compétitions officielles qu’en 2013, date de son affiliation à la Fédération sénégalaise de football. Il est le symbole d’une ascension fulgurante. Dès sa première année, l’équipe est battue en finale du championnat régional par Dakar Sacré-Cœur, et cette année, elle s’est qualifiée en demi-finale des play-offs du championnat en disposant de… Dakar Sacré-Cœur (2-1), le jour même où les dirigeants faisaient face à la presse pour parler de ce projet ambitieux.
Diambars, Génération Foot et Aspire comme modèles
Ce projet est porté par un entrepreneur sénégalais basé en Italie depuis une quinzaine d’années. Passionné de football, Galasse Mbacké a donc décidé d’investir dans l’objet de ses fantasmes. Pas seulement pour gagner de l’argent. « C’est un centre qui a la particularité d’œuvrer pleinement dans le social en dehors de ses activités purement sportives. Il apporte un soutien appuyé aux jeunes défavorisés et de même qu’à leurs parents qui ont des difficultés à faire face aux vicissitudes de la vie », précise le vice-président Khadim Mbow. Mais, le social n’est qu’une partie de l’ambitieuse vision de ses dirigeants. Leur objectif ? « La construction d’un grand centre de formation à l’image de Diambars et de Génération foot qui va allier Sport et Etudes ». Mbaye Badji, nommé conseiller technique, l’affirme en termes clairs : « Notre objectif est d’arrivée à leur niveau, c’est d’ailleurs pourquoi j’ai adhéré à ce projet. On est en train de travailler et j’espère qu’on y arrivera ». En tout cas, au vu des résultats de ces deux premières années, il y a bien de quoi être optimiste pour l’avenir.
Des intérêts défendus par l’avocat de Pogba, Ibrahimovic, Balotelli et de Riaola
Une ambition colossale qu’ils espèrent réaliser surtout avec le transfert des joueurs. Ils en ont déjà placé surtout dans des formations italiennes. Les frères Yves et Joël Baraye (Chievo Verone et Brescia), Abdou Lahat Diakhaté (Fiorentina), Moustapha Bèye (Novara), Papis Sall (Parme), Seydou Sy (Monaco). Ces transferts ont déjà rapporté quelque chose, mais « la plupart de ces joueurs viennent de signer leur premier contrat. Il y a des retombées minimes que nous avons reçues mais ce n’est pas ce que les gens pensent », calme le vice-président. En attendant de profiter pleinement des retombées des transferts de ces jeunes joueurs, les dirigeants s’efforcent de mettre l’équipe dans les meilleures conditions de travail. « Les membres du staff reçoivent des salaires mensuels réguliers. Les joueurs perçoivent des primes après chaque match. Chaque joueur reçoit deux jeux de maillots et deux paires de chaussures renouvelés semestriellement », révèle M. Mbow. En outre, les responsables s’appuient déjà sur des bases solides pour faciliter les transactions entre le centre et les clubs qui désirent les recruter. « Tout joueur appelé à faire des tests est entièrement pris en charge par Darou Salam. C’est M. Vittorio Rigo, avocat de Pogba, Ibrahimovic, Balotelli et de leur agent Mino Raiola qui défend les intérêts de ces joueurs appelés à faire des tests en Europe », ajoute M. Mbow. Une façon pour le dirigeant de montrer tout le sérieux qui entoure cette belle initiative.
Mbaye Badji,conseiller technique : « Ce qui fera réussir le projet… »
Dans le cadre de son projet de développement, le Centre Darou Salam s’est attaché les services de Mbaye Badji, ancien international qui a coaché Yeggo et le Duc. Le technicien se dit séduit par la vision des initiateurs.
Coach, Darou Salam a participé à deux tournois en Europe cette année dont le deuxième a été remporté par vos joueurs. Au-delà du trophée, que vous ont appris les deux voyages effectués ?
« Je pense que sur le plan technique et tactique, les garçons ont beaucoup appris de ces deux tournois. Parce qu’aller se frotter à de grandes équipes européennes comme le Milan AC, la Juventus de Turin, le Partizan de Belgrade, où ils rêvent de jouer un jour, fait grandir les enfants. Quand ils gagnent devant ces équipes, forcément cela les motive et les hisse à un autre niveau. Cette coupe que nous avons remportée montre qu’on a très bien travaillé cette année et ce n’est que le commencement. Si on continue à travailler avec ces gosses, je suis sûr qu’on aura une très grande équipe ».
Parlez-nous un peu de ce projet.
« Darou Salam, pour moi, est un projet intéressant parce que le président est quelqu’un qui a beaucoup d’ambitions pour les jeunes. Son objectif premier est d’aider les enfants des HLM Grand Yoff, les mettre dans de très bonnes conditions pour qu’ils puissent réussir dans leurs projets. Il leur donne surtout l’opportunité d’exprimer leur talent parce qu’il y a beaucoup de joueurs talentueux à Grand Yoff qui n’ont pas la chance de jouer dans de grands clubs. C’est ce que le propriétaire du centre leur propose, en les aidant à décrocher des contrats à l’étranger dans des clubs professionnels pour pouvoir réussir dans la vie ».
Qu’est-ce qui peut pousser un technicien qui a entraîné des clubs professionnels à accepter de travailler pour un centre de formation ?
« Si j’ai accepté c’est parce que c’est un projet ambitieux et je voudrais participer à aider ces jeunes à réussir. Ce centre peut être une vitrine pour les jeunes de Grand Yoff qui a beaucoup de talents et aussi pour le football sénégalais. Cela s’est d’ailleurs traduit par leurs bonnes prestations aux deux tournois qu’ils ont joués en Europe. Au premier, ils ont terminé à la troisième place, le deuxième ils l’ont remporté. Ce qui nous fait grandir et je pense que le meilleur reste à venir ».
Le fait d’être implanté dans un quartier populaire sera-t-il déterminant dans la réussite de ce projet ?
« Bien sûr. Je pense que c’est ce qui va faire sa force. C’est un peu comme Niary Tally. Grand Yoff est un quartier très peuplé où les gens aiment le football. Avec le temps, ils vont adhérer au projet. Ils sont d’ailleurs en train de le faire en ce moment. Les populations, surtout les jeunes, sont de plus en plus collées à l’équipe. C’est motivant pour les jeunes. Le public est toujours présent aux entraînements, ce qui est très encourageant ».
Au Sénégal Diambars, Dakar Sacré-Cœur, Génération Foot et Aspire sont devenus les références en matière de formation. Ces modèles ont-ils inspiré le projet Darou Salam ?
« Ces centres de formation nous inspirent, bien évidemment. Pour moi, la réussite du projet ne se fera qu’en s’inspirant des projets des autres. Notre objectif est d’arriver à leur niveau, c’est d’ailleurs pourquoi j’ai adhéré à ce projet. On est en train d’y travailler et j’espère qu’on y arrivera ».
Qui dit réussite dit moyens, est-ce qu’ils sont là ?
« L’initiateur fait beaucoup d’efforts pour mettre le centre dans de très bonnes conditions. Certes il est pour le moment seul, mais il est en train de faire le maximum pour y arriver. C’est un homme qui a beaucoup d’ambitions et qui consent beaucoup de sacrifices pour réussir. C’est vraiment quelqu’un de très ambitieux. Le centre est très ambitieux ».
Réalisé par
Wahany Johnson SAMBOU
Source : Le Soleil